Cela s'appelle l’entomophagie.
Et si le fait de manger des insectes est encore choquant pour la plupart des occidentaux, cette pratique est naturelle dans de nombreuses cultures : environ 80% des pays de la planète sont entomophages, principalement en Afrique, en Asie et en Amérique latine.
Près de 1400 espèces d’insectes sont consommées, principalement les coléoptères, les chenilles, les abeilles, les guêpes et les fourmis, suivis de près par les sauterelles, les criquets et les grillons.
Les insectes sont consommés frits, bouillis, grillés ou sous forme de farines.
Manger des insectes est une pratique ancestrale en Europe puisqu’on en trouve des traces dans l’antiquité. Aristoste faisait l’éloge des nymphes (larve de cigale) en les décrivant comme des mets exquis. La Bible et le Coran mentionnent la consommation d’insectes.
Riches en protéines et pauvres en graisse, les insectes sont considérés comme une réelle alternative alimentaire par l’ONU.
L’idée de manger des insectes peut être incongrue pour les Européens, et pourtant nous en mangeons 500 g par an à notre insu : il s’agit essentiellement de fragments d’insectes dissimulés dans les farines de céréales (le pain et les biscuits), mais on en trouve également des traces dans les soupes et les compotes industrielles.
UN ENJEU DE SAUVEGARDE PLANÉTAIRE
Un récent rapport de l’ONU explique que si l’homme devenait entomophage, on pourrait récupérer 30% des surfaces de la planète consacrées à l’élevage, réduire de 18% nos émissions de gaz à effet de serre et baisser de 33% le coût de l’alimentation.
En effet, l’élevage d’insectes est le plus écologique, et le plus économique de tous les élevages de sources de protéines animales.
Pour 10 kg de nourriture, les éleveurs produisent 1 kg de bœuf, 3 kg de porc, 5 kg de volaille et 9 kg d’insecte ! Les bœufs, porcs et volailles n’utilisent pas la nourriture qu’ils ingèrent uniquement pour faire des réserves et prendre du poids, ils s’en servent également pour maintenir une température corporelle constante. Les insectes n’ont pas ce besoin et n'utilisent la nourriture que pour prendre du poids.
D’ici 2050, nous serons 9 milliards sur Terre et la question de pouvoir nourrir tout le monde se pose réellement. La consommation d’insectes semble être la meilleure des alternatives.
Valeur nutritionnelle des insectes
Deux chercheurs, Rumpold et Schlüter, ont compilé en 2013 les compositions nutritives de 236 espèces d’insectes comestibles.
Les valeurs nutritionnelles des insectes sont très variables selon l'espèce. Et même au sein d’une même espèce, ces valeurs peuvent changer en fonction de l’état de métamorphose de l’insecte (état de larve ou état adulte), en fonction de leur habitat et de leur régime alimentaire.
De plus, le mode de préparation influe directement sur la valeur nutritionnelle : en effet, les insectes frits seront plus riches en lipides et plus caloriques que les insectes bouillis.
Les valeurs nutritionnelles des insectes restent cependant mal connues car très peu d’études sur le sujet ont été faites et beaucoup sont peu fiables.
En 1997, Ramos Elorduy a étudié 79 espèces provenant du monde entier dont il a évalué l’apport calorique. Comme pour la composition en nutriments, la valeur énergétique dépend de l’alimentation de l’animal.
TABLEAU : EXEMPLES DE VALEUR ÉNERGÉTIQUE DE QUELQUES ESPÈCES D'INSECTES POUR 100g D'INSECTES FRAIS
Nom de l’insecte |
Valeur nutritionnelle pour 100g en Kcal |
Sauterelle australienne |
499 |
Fourmi verte |
1272 |
Sauterelle à pâtes rouges |
160 |
Vers de farine (larve) |
206 |
Vers de farine (adulte) |
138 |
Termite (adulte) |
535 |
Fourmi coupe feuille |
404 |
Fourmi à miel |
116 |
Criquet |
120 |
Punaise d’eau géante |
165 |
Sauterelle vietnamienne |
89 |
Vers à soie |
94 |
Sauterelle migratrice |
179 |
Source FAO 2012
Les insectes sont principalement constitués de protéines, d’acides gras, des fibres, de vitamines et d'oligo-éléments.
Les études montrent que les acides aminés (les composants des protéines) sont de qualité satisfaisante pour l’Homme.
Le taux de protéines varie de 13% à 77% selon l’alimentation des insectes : un insecte herbivore sera moins riche en protéines qu’un insecte carnivore.
TABLEAU COMPARATIF DE LA TENEUR EN PROTÉINES ENTRE LES INSECTES, LE POISSON ET LA VIANDE
ANIMAL |
ESPÈCES |
TENEUR EN PROTÉINES POUR 100g |
Insectes |
Sauterelles (larves) |
14 à 18% |
|
Sauterelles (adultes) |
13 à 28% |
|
Chapulines (criquets mexicain) adultes |
35 à 48 % |
|
Vers à soie |
10 à 17% |
|
Scarabées (larves) |
7 à 36 % |
|
Vers de farine (larve) |
14 à 25% |
|
Criquets (adultes) |
8 à 25% |
|
Termites (adultes) |
13 à 28% |
Viandes |
Bœuf |
19 à 26% |
|
Volaille |
14 à 30% |
Poissons |
Maquereau |
16 à 28% |
|
Homard |
17 à 19% |
|
Crevette |
13 à 27% |
Source FAO 2012
Les acides gras présents sont des acides gras poly et mono insaturés. Les insectes contiennent 38% de lipides pour 100 g de masse sèche (c’est-à-dire d’insectes séchés). Très peu d’études ont été faites en ce qui concerne les compositions en matières grasses des insectes. Nous ne sommes pas en mesures de fournir plus d’informations.
Ils sont riches en oligo-éléments tels que le cuivre, le zinc, le manganèse, le fer, le magnésium, le phosphore et le sélénium. Ils sont également riches en vitamines du groupe B (B2, B5, B8 et de la vitamine B9 dans certains cas). Les études se contredisent au sujet de la biodisponibilité de ces composants (désaccord quant au taux d’absorption dans l’organisme).
En ce qui concerne les risques alimentaires liés aux insectes par rapport aux transmissions de maladies et aux risques allergiques, toute la lumière sur la question n’a pas encore été faite.
Pour conclure, bien avant de travailler sur les risques alimentaires liés aux insectes, il faut déjà travailler sur l’aspect psychologique de la consommation volontaire et régulière d'insectes. Les chercheurs et les ingénieurs en marketing travaillent sur le sujet. Affaire à suivre …
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