Hémophilie

Définition

Définition

L’hémophilie est une maladie héréditaire liée au chromosome X et se caractérisant par un trouble de la coagulation du sang entraînant l’apparition de saignement le plus souvent de façon prolongé. L’hémophilie se transmet sur un mode récessif lié au sexe c’est-à-dire que le gène responsable de cette affection hématologique (maladie du sang) se trouve sur l’un des deux chromosomes X de la mère. Autrement dit cette maladie est uniquement transmise par les mères au garçon qui développe l’hémophilie. Les filles quant à elles ne présentent pas l’hémophilie à part dans quelques cas mais alors la maladie n’est pas grave. Une femme qui est porteuse du gène de la maladie aura, dans ces conditions, la moitié de ses fils hémophiles et la moitié des filles qui sont porteuses du gène mais ne présentent pas la maladie sauf exceptionnellement pour les formes mineures. Les autres enfants aussi bien les filles que les garçons sont indemnes de la maladie c’est-à-dire ne seront pas hémophiles. À l’opposé un malade hémophile homme va transmettre le gène anormal à toutes ses filles qui deviennent alors porteuses du gène mais les fils de ce père sont indemnes.

Historique

Pendant une très longue période toutes les maladies liées à un saignement excessif étaient confondues avec l’hémophilie. Cette maladie inconnue depuis des millénaires puisqu’il est dit dans le Talmud que sont dispensés de circoncision rituelle les enfants mâles nés d’une mère ayant enfanté des fils dont la circoncision a donné lieu à une hémorragie. La reine Victoria était conductrice et plusieurs de ses descendants également. Le tsar Nicolas II quant à lui souffrait aussi de cette pathologie.

C’est en 1803 que la première description de cette pathologie a eu lieu dans la littérature médicale. L’auteur J. C. Otto évoquait pour la première fois la possibilité d’une transmission génétique.
Le terme d’hémophilie est dû à F. Hopff en 1828.

En 1911 W. Bulloch et P. Fildes définissent les principaux symptômes présentés par le patient hémophilique.

À partir de 1937 A. J. Patek et F. H. Taylor proposent de nommer "globuline antihémophilique" le facteur de coagulation non présent ou dont la quantité est diminuée dans le plasma des hémophiles.
Entre les années 1947 et 1953, A. Pavlosky, I. Schulman et C. H. Smith, J. C. F. Poole montrent l’existence de deux types d’hémophilies.

Ce n’est qu’en 1954 que le Comité international de nomenclature définit les deux groupes d’hémophilies: hémophilie A liée à un déficit en facteur VIII (facteur antihémophilique A) et hémophilie B due à un déficit en facteur IX (facteur antihémophilique B).

Pendant ce temps les scientifiques démontrent que cette pathologie est transmise de façon héréditaire par l’étude généalogique des familles frappées par cette pathologie.

Plus récemment le clonage du gène du facteur IX par Choo et ses collaborateurs en 1982 et celui du facteur VIII par Gitschier et ses collaborateurs a été obtenu en 1984. D’autre part la mise en place du diagnostic anténatal par analyse génotypique de l’ADN du chromosome X et la synthèse du facteur VIII par génie génétique (facteur VIII recombinant) est maintenant possible.

Classification

Il est nécessaire de distinguer deux sortes d’hémophilie.

L’hémophilie A qui représentent 80 % des cas se caractérisant par un déficit du facteur VIII et l’hémophilie B qui représente 20 % des cas et qui est le résultat un déficit du facteur IX. Environ une naissance sur 5000 est concernée par l’hémophilie A et une naissance sur 30 000 est concernée par l’hémophilie B. Ce que l’on appelle les facteurs sont des éléments qui interviennent pour permettre une coagulation normale du sang. Physiologiquement c’est-à-dire normalement le sang met en jeu 13 facteurs qui doivent intervenir dans une chaîne de réaction à fin d’obtenir une coagulation normale du sang. Il existe de nombreuses interactions, d’autre part complexes entre les différents facteurs, ayant pour résultat, au final, de transformer une protéine soluble le fibrinogène en une protéine insoluble la fibrine constituant l’armature du caillot sanguin après stabilisation par le facteur XIII.

Le diagnostic d’hémophilie est donc porté sur une surtout chez un individu de sexe masculin. D’autre part il est important de rechercher des antécédents de la famille, d’hématome, d’hémarthrose ayant récidivé et dont les analyses biologiques montrent un allongement du temps de céphaline activée.

Il est très importante de distinguer l’hémophilie A de l’hémophilie B. En effet, grâce à des examens spécifiques de laboratoires. Il est possible de mettre en évidence la diminution du facteur VIII (appelé également facteur antihémophilique A, essentielle pour la formation de la thromboplastine) au cours de l’hémophilie A et du facteur IX dans l’hémophilie B (appelé également facteur antihémophilique B ou PTC c’est-à-dire plasma thromboplastin component. Cette variété d’hémophilie appelée également maladie de Christmas concerne 25 000 à 50 000 naissances enfants malades. Le traitement étant différent pour les deux types d’hémophilie, cette distinction est très importante.

Les individus souffrant d’hémophilie ont des symptômes plus ou moins graves. La gravité de l’hémophilie va dépendre de l’importance du déficit du facteur antihémophilique. Autrement dit les hémorragies à répétition présentées par le patient seront d’autant plus graves que le déficit en facteur sanguin VIII et IX sera important.

Pour les formes légères c’est-à-dire quand le taux en facteur VIII ou en facteur IX est supérieur à 5 % les hémorragies ne surviendront qu’à la suite d’interventions chirurgicales ou d’extraction dentaire par exemple.

Pour les formes modérées c’est-à-dire quand le taux sanguin de facteur VIII et de facteur IX est compris entre un et 5 %, les hémorragies surviennent à la suite de traumatismes ou de chutes.

En ce qui concerne les formes sévères, c’est-à-dire quand le taux sanguin de facteur VIII ou de facteur  IX est inférieur à 1 %, les saignements surviennent spontanément dans n’importe quel endroit du corps, entraînant ce que l’on appelle des épanchements sanguins. Il peut s’agir par exemple d’hématomes au niveau d’un muscle ou de la peau, d’hémarthroses c’est-à-dire de collection de sang  à l’intérieur d’une articulation et d’hématuries quand il s’agit de présence de sang dans les urines. En ce qui concerne les hémorragies musculaires c’est le plus souvent le muscle psoas qui est un muscle situé à l’intérieur de l’abdomen, en arrière de celui-ci, qui est concerné. Ceci aboutit à l’apparition de douleurs qui irradient dans la cuisse et vers le genou est d’autre part par une présence ayant l’aspect d’une pâte à l’intérieur de la fosse iliaque (zone située à droite du nombril juste au-dessus de la racine de la jambe).


L’hypoconvertinémie congénitale hémorragipare de Beaumont et Bernard est un syndrome constitutionnel analogue à la parahémophilie d’Owren mes apparaissant dès la naissance. Cette pathologie se caractérise par la survenue à répétition d’hémorragies graves et par l’allongement du temps de Quick. Cette affection est secondaire à une carence, dans le sang : la convertine.

L’angiohémophilie de Schumann (en anglais angiohaemophilia) appelée également hémophilie vasculaire correspond une pathologie se caractérisant à l’égal de l’hémophilie, par la survenue d’hémorragies à répétition mais différentes de l’hémophilie " classique " par l’absence d’atteinte familiale. D’autre part les résultats des examens de laboratoire portant sur la coagulation sanguine du patient les examens de sang et plus particulièrement le temps de coagulation sont normaux (malgré la diminution des facteurs anti-hémophiliques A ou B). Pour les spécialistes le temps de saignement est allongé, la résistance des capillaires (micro vaisseaux) est très diminuée et les capillaires semblent normaux. L’ administration de plasma contenant la fraction I de Cohn améliore cette pathologie. Il semble s’agir d’une variété ou d’une forme de la maladie de von Willebrand.

De grands progrès thérapeutiques (préparation de fractions plasmatiques concentrées contenant l’un ou l’autre des facteurs antihémophiliques) permettent maintenant de corriger les troubles de la coagulation. Les transfusions ont été, il y a quelques années, à l’origine de la contamination, d’un nombre élevé d’hémophiles par des virus de l’hépatite (B et C) et du déficit immunitaire humain (VIH). Grâce à l’utilisation de produits chauffés maintenant, il est possible de limiter la contamination par le virus VIH. Les produits utilisés à l’heure actuelle sont de très haute pureté ou ultrapurs. Autant dire que le risque est quasiment nul vis-à-vis du virus VIH et des virus des hépatites B et C.

Symptômes

Physiopathologie

Sur le plan génétique l’hémophilie est le résultat de mutation des gènes du facteur IIIV pour l’hémophilie A le gène étant HEMA situées sur le locus Xq28 et, pour l’hémophilie B. le gène étant HEMB situé sur le locus Xq27.1-q27.2. Il existe également des formes sporadiques c’est-à-dire des malades qui n’ont aucun antécédent dans la famille c’est-à-dire d’autres personnes hémophiliques qui auraient pu éventuellement leur transmettre cette maladie. Dans ce cas l’hémophilie est le résultat d’une mutation spontanée autrement dit le gène à l’origine de la maladie a subi une transformation de lui-même et n’a pas été reçu par un membre de la famille.

Les hémorragies des articulation que l’on appelle hémarthroses sont fréquentes et surviennent essentiellement entre l’âge de 5 et 10 ans. Elles concernent essentiellement les grosses articulations telles que le genou, les chevilles, les coudes et les épaules. L’atteinte articulaire est susceptible d’évoluer vers une limitation de l’amplitude articulaire (limitation des mouvements). Certains patients souffrent également d’arthropathie invalidante (quasi-impossibilité de bouger les membres).
Les hémorragies peuvent également survenir en dessous de la peau (hémorragies sous-cutanées et en dessous des muqueuses c’est-à-dire de la couche de cellules qui recouvrent l’intérieur des organes creux comme la bouche etc.). Par exemple ces hémorragies surviennent au cours d’injection pour une anesthésie dentaire.

D’autres hémorragies sont susceptibles de survenir, il peut s’agir d’hémorragies intestinales (essentiellement chez le nourrisson), de présence de sang dans les urines (hématuries), d’hémorragies rétropéritonéales et d’hémoptysie (hémorragies provenant des voies respiratoires).

Examen médical

Labo

Les examens de laboratoire comprennent la recherche du temps de céphaline kaolin qui est toujours plus ou moins allongé. Ce test est beaucoup plus sensible que le temps de coagulation. En effet pour les patients souffrant de formes modérées, le temps de coagulation classique est quelquefois normal alors que le temps de céphaline kaolin quant à lui, est plus ou moins allongé.

Le temps de consommation de la prothrombine est allongé.

Le temps de coagulation n’a plus cours car il est quelquefois normal au cours de l’hémophilie modérée mais toujours allongé dans les formes graves d’hémophilie.

Les autres tests de la coagulation sont normaux (taux de plaquettes, test de saignement sauf après avoir administré de l’aspirine au patient, temps de Quick, temps de prothrombine, résistance capillaire, taux de fibrinogène).

Bien entendu le dosage des facteurs de coagulation est diminué. Le facteur VIII dans l’hémophilie A ou le facteur IX dans l’hémophilie B. La gravité de l’hémophilie est directement dépendant de l’intensité du déficit.

Le laboratoire recherchera également la présence d’anticorps inhibiteurs qui sont les anticorps antifacteur VIII qui apparaissent dans 15 à 30 % des cas en cas d’hémophilie A sévère et le plus souvent précocement dans les 50 premières jour après avoir été transfusé par des concentrés de facteur VIII dont l’efficacité est compromise dans ce cas.

Traitement

Traitement

Le traitement de l’hémophilie consiste à administrer du facteur VIII ou du facteur IX selon le type d’hémophilie. Ensuite il est nécessaire de contrôler la posologie à administrer par un dosage du facteur déficitaire durant le traitement de substitution. En ce qui concerne les formes modérées le traitement substitutif peut être appliqué en cas de survenue d’hémorragies. Pour les patients souffrant d’hémophilie sévère il est nécessaire d’administrer systématiquement du facteur VIII ou du facteur IX à titre prophylactique (en prévention) à partir de l’âge de 1 à 2 ans, ce qui transforme une hémophilie sévère en une hémophilie modérée. De cette façon on réduit de façon très importante le risque de survenue de collections sanguines à l’intérieur des articulations.

Il n’y a pas d’inconvénient à injecter la totalité du flacon. Le risque de surdosage est quasiment impossible. Le produit doit être injecté strictement par voie veineuse direct et à une vitesse de 2 ml par minute sans avoir, au préalable, diluer. D’autre par le produit ne doit pas être mis dans un flacon de perfusion.

Spécifiquement, en ce qui concerne l’hémophilie A, le facteur VIII humain recombinant ou d’origine plasmatique est utilisé.

En ce qui concerne l’hémophilie B le facteur IX humain provenant du plasma est utilisé. Néanmoins le facteur IX concentré possède l’avantage de permettre une correction pour un petit volume.

Si on n’arrive pas à corriger le déficit en facteur VIII et en facteur IX et donc à arrêter l’hémorragie, il est nécessaire d’envisager la présence d’anticorps antifacteurs VIII ou antifacteur IX. Dans ce cas il est possible que le patient fabrique des anticorps antifacteurs VIII et antifacteur IX. Ces anticorps apparaissent dans la majorité des cas dans 20 à 50 % des cas d’hémophilie A sévère et sont traités par le facteur VIII. Chez certains patients la plasmaphérèse est utile. La plasmaphérèse est un échange de plasma du patient.

L’utilisation de transfusions de sang frais est uniquement indiqué quand le patient présente une anémie aiguë.

En cas d’hémorragie l’acide aminocaproïque par voie buccale est quelquefois utile afin de prévenir l’hémorragie buccale après un traitement dentaire par exemple.

En cas d’hémarthrose (collection sanguine dans une articulation) il est nécessaire d’effectuer un pansement en utilisant par exemple un morceau de caoutchouc mousse qui est comprimé par une grande élastique. L’immobilisation dans une gouttière est également utile en ce qui concerne les articulations. L’utilisation des corticoïdes (cortisone) permet quelquefois de résorber l’épanchement sanguin. Une fois l’hémorragie contrôlée, au bout de quelques jours, on mobilise l’articulation doucement de manière passive et active.

La prévention des hémorragies se fait de la façon suivante. Il est nécessaire d’éviter les injections intramusculaires et d’effectuer des compressions longues après avoir prélevé du sang intraveineux. Il est également nécessaire toujours de corriger le déficit en facteur VIII et en facteur IX pour n’importe quelle intervention chirurgicale. Les interventions dentaires doivent être considérées comme n’importe quelle intervention chirurgicale plus ou moins importante. Il est d’autre part recommandé, aux patients souffrant d’hémophilie, de ne pas avoir d’activité dont le risque est élevé, en particulier certains sports.

Les association d’hémophiles proposent de nombreux renseignements et une aide pragmatique.

Certains médicaments doivent être évités en particulier l’aspirine et les anticoagulants. L’aspirine utilisée comme analgésique doit être remplacée par le paracétamol et éventuellement l’ibuprofène dont l’action, sur les plaquettes, est plus brève que celle de l’aspirine.

Évolution

Complications

Les complications susceptibles survenir au cours de l’hémophilie sont les suivantes. Les collections sanguines à l’intérieur des articulations survenant répétitivement, sont susceptibles d’entraîner des séquelles au niveau des articulations.
L’hématome du muscle psoas est quelquefois confondu avec une appendicite aiguë (diagnostic différentiel). La survenue de douleurs au cours de l’hémophilie s’explique par la présence d’hématome, de collection de sang en périphérie des structures nerveuses tels que les troncs nerveux. Ce phénomène explique également la survenue de troubles de la sensibilité de la motricité chez certains patients. D’autres complications de nature infectieuse sont beaucoup moins fréquentes depuis la vérification du sang qui doit être transfusé. Ainsi la transmission du virus de l’hépatite et du virus de l’immunodéficience humaine (sida) par des dérivés sanguins a quasiment disparu depuis l’année 1985. Néanmoins il est fortement nécessaire de recommander la vaccination contre l’hépatite A et l’hépatite B. chez l’hémophilie.

Le pronostic de l’hémophilie est variable selon qu’il existe ou pas des hémorragies spontanées qui sont rarement dangereuses. L’apparition d’hémorragies internes peut évoluer vers le décès du patient.

Prévention

Il est possible de prévenir, en effectuant un diagnostic prénatale pour l’hémophilie A, cette maladie, grâce à la réaction PCR qui permet l’analyse de l’ADN du gène du facteur VIII à l’intérieur des cellules du trophoblaste qui ont été prélevé (choriocentèse) à partir de la 10e semaine d’aménorrhée. Le diagnostic sur du sang provenant du foetus peut être réalisé à partir de la 18e semaine, par le dosage des facteurs de coagulation VIII et IX.

Le dépistage des porteurs est possible. Pour l’hémophilie A il faut effectuer un test est PCR soit directement par la mise en évidence de la mutation du gène du facteur VIII soit directement par la reconnaissance du polymorphisme intragénique et extragénique.

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