Dermatosclérose

Définition

Définition

La dermatosclérose, appelée également sclérodermie systémique ou progressive, est une maladie rare caractérisée avant tout par durcissement diffus, associé à une altération et une dégénérescence du derme (zone de la peau située sous l’épiderme, qui est la couche la plus superficielle), plus précisément du tissu conjonctif.

Classification

La dermatosclérose se présente sous différents types :

  • La dermatosclérose en goutte : se traduit par de petits éléments arrondis, de coloration blanche, et d’aspect nacré, se situant essentiellement au niveau du cou, de la nuque, des épaules, et en haut du thorax.
  • La dermatosclérose en bande : forme des bandes bien délimitées de tissu ferme de coloration blanc nacré, bordées par un liseré de couleur pourpre. La dermatosclérose en bande, siège essentiellement sur les membres, le cuir chevelu, et le visage. Les lésions survenant à la suite dermatosclérose en bande, sont susceptibles de laisser des séquelles esthétiques et fonctionnelles, comme une limitation des mouvements des articulations. 
  • Plaques cutanées appelées morphées : de couleur et de consistance identiques aux lésions de la dermatosclérose en bande. Ces plaques sont susceptibles de persister pendants plusieurs années, puis de guérir en laissant des cicatrices peu visibles.
  • La forme limitée consiste en un ensemble de manifestations dénommé CREST, correspondant aux initiales de chacune des pathologies suivantes :
    • La calcinose correspond à l’apparition de petites masses de calcification au niveau de la peau, accentuant la survenue d’ulcères de la peau, situés juste en dessous, en regard des saillies osseuses, au niveau des pieds et des mains. Le terme calcinose, en anglais calcinosis, correspond à la production, à l'intérieur de l'organisme, de dépôts de sels de calcium. Cette synthèse a lieu dans différents organes (la peau, les muscles, les viscères tels que l'estomac, les artères, et plus rarement les poumons). Quelquefois, elle est localisée à un seul organe comme c'est le cas d'un néphrocalcinose (calcinose du rein). La calcinose, de façon générale, s'observe dans différentes affections, soit celles s'accompagnant d'une hypercalcémie (élévation du taux de calcium dans le sang), de métastases osseuses, fibrokystiques, de myélomes. Au cours d'un excès d'apport de vitamine D (hypervitaminose D), comme ceci est le cas par exemple au cours du syndrome de Burnett, ou dans certaines insuffisances de fonctionnement de la filtration rénale (insuffisance rénale), on constate l'apparition de calcinose également.
    • Le syndrome de Raynaud (R) : les doigts des mains et des pieds, comportent de petites artères, les artérioles. Soumises au froid, elles se ferment (leur calibre diminue), entraînant une chute de la vascularisation. Il s’agit d’une ischémie digitale paroxystique, qui se manifeste par l’apparition successive d’épisodes de pâleur et de cyanose (coloration tirant sur le bleu gris et traduisant un manque d’oxygène dans les doigts). Une coloration rouge vif, associée à une douleur des doigts atteints, peut être provoquée par un réchauffement trop brutal, ou un stress émotionnel interrompant l’arrivée du sang. La localisation de ce phénomène se limite parfois à deux ou trois doigts de chaque main.
    • Une atteinte de l’oesophage (E) qui n’est plus capable d’effectuer les mouvements de péristaltisme (contraction automatique faisant avancer les aliments). Ceci peut d’ailleurs être confirmé par la manométrie oesophagienne (prise de la pression à l’intérieur de l’oesophage), et qui se traduit également par une dysphagie (gène quand le patient avale les aliments).
    • Une sclérodactylie (S), dans laquelle la peau devient rigide, lisse et impossible à pincer. Les doigts prennent une forme effilée, et se plient en une flexion irréductible (il est impossible de les redresser). Au niveau du visage, apparaît une télangiectasie, qui correspond à une dilatation des petits vaisseaux sanguins de la peau, pouvant se voir également au niveau des mains et des pieds. La dermatosclérose généralisée ou systémique, se caractérise par une atteinte cutanée associée à des manifestations viscérales multiples. La première manifestation de la dermatosclérose systémique, est le plus souvent un syndrome de Raynaud.
  • Le syndrome de chevauchements comme la sclérodermatomyosite qui se caractérise par un épaississement de la peau, et une faiblesse musculaire qui est difficilement différenciable de la polymyosite.
  • La MMTC touchant les muscles et le squelette, provoquée par l’absorption de poison comme lors du syndrome de l’huile toxique SHT, qui s’est produit à Madrid en 1981 et qui a touché environ 20 mille personnes.
  • Un syndrome proche de la dermatosclérose associant des douleurs musculaires invalidantes, accompagnées d’une éosinophilie (présence dans le sang d’une variété de globules blancs, les éosinophiles). Il a été associé à l’absorption de L. tryptophanne (variété d’acides aminés), sans doute due à une intoxication par un agent contaminant.
  • La sclérodermie de Buschke ou sclérœdème de Buschke, correspond à une modification locale de la peau se caractérisant par une induration cutanée (perte d'élasticité de la peau ( diffuse dont on ne connaît pas avec précision l'étiologie (la cause), et qui se présente le plus fréquemment associée avec du diabète sucré (élévation du taux de sucre dans le sang nécessitant un traitement). Cette affection dermatologique (dermatose) est prédominante dans le sexe féminin. Elle survient le plus souvent niveau du visage, de la tête, et s'étend vers les autres parties du corps concernant également, quelquefois les tissus non cutanés. Généralement, la sclérodermie de Buschke est précédée de diverses infections essentiellement celles dues au staphylocoque dont l'évolution se fait environ sur deux ans, et qui se termine vers sa résolution spontanée. Le sclérœdème de Buschke, débute au niveau du cou et du visage. Son extension se fait progressivement de manière centrifuge (du centre vers extérieur jusqu'au thorax et au bras).
  • Le scléromyxœdème appelé également mucinose papuleuse, correspond à un infiltrat de sclérodermie de forme diffuse au cours duquel la peau apparaît dure et épaisse. Les symptômes sont l'apparition d'éruptions de papules généralisées avec une induration sclérodermoïde en dessous de la peau. Le visage du patient adopte un aspect léonin (ressemblant au lion), à cause de l'apparition de rides longitudinales de la glabelle (zone du squelette du visage située entre les deux crêtes des sourcils). Il s'agit d'un signe typique. Dans la majorité des cas, c'est-à-dire environ 80 %, les analyses mettent en évidence une gammapathie monoclonale IgG lamda. Le terme gammapathie, du grec gamma et pathê : maladie, en anglais gammapathy, correspond à une maladie se caractérisant par une anomalie des gammaglobulines sériques (anticorps contenus dans la partie liquidienne du sang). Néanmoins l'apparition de myélome est rare. Chez certains patients on constate la survenue d'atteinte musculaire, du tissu neurologique, des articulations des reins, du coeur, des vaisseaux ainsi que des poumons.
  • L'acrosclérose.
  • Sclérodermie en plaques ou morphée.

Symptômes

Symptômes

1 – Au niveau de la peau l’induration s’accompagne, au fur et à mesure de la progression de la maladie, d’une rétraction de plus en plus importante, d’un aspect luisant et hyper-pigmenté (augmentation de la coloration). Le visage est comparable à un masque. L’atteinte vasculaire, que traduit la télangiectasie, apparaît sur le thorax, le visage, les lèvres, la langue et les doigts. Enfin, il apparaît des calcifications (calcinose) au niveau de la pulpe des doigts.

2 – Au niveau de l’appareil tendineux et musculaire, en particulier au niveau du genou, il est le siège de frottements à l’origine de tendinite, de bursite (inflammation des tendons et des bourses) dues à un dépôt de fibrine (variété de protéines) au niveau de la membrane synoviale. La déformation articulaire est caractéristique et associée à des ulcères favorisés par les calcifications.

3 – Au niveau de l’appareil digestif, c’est essentiellement l’œsophage qui est atteint. Cela se traduit par une dysphagie (difficulté à avaler) s’accompagnant d’une inflammation avec survenue d’ulcères (plaies de la muqueuse) et de sténose (rétrécissement du conduit œsophagien). Il s’associe dans 1/3 des cas à une métaplasie de Barret, affection se caractérisant par la présence de cellules recouvrant normalement l’intérieur de l’estomac dans le bas de l’œsophage, juste au-dessus de la jonction normalement située entre l’estomac et l’œsophage (oesophago-gastrique). Ce syndrome associe une hernie hiatale (issue de l’estomac à travers le trou permettant le passage de l’œsophage) et des ulcères de la zone située en bas de l’œsophage (ulcères de Barret) qui peuvent éventuellement présenter une dégénérescence cancéreuse.

4 – Au niveau de l’intestin grêle, on peut observer une anomalie d’absorption des aliments (nutriments) due à une multiplication des microbes de la flore intestinale. Il existe également la présence de diverticules caractéristiques au niveau de l’iléon et du côlon dus à la diminution d’une des parois constituées de muscles lisses (muscles autonomes) à ce niveau. Enfin, on peut assister à l’apparition de cirrhose biliaire (dégénérescence de la vésicule biliaire).

5 – Au niveau de l’appareil rénal, la modification de l’intérieur des artères de cet organe entraîne une anomalie de fonctionnement sévère, s’accompagnant d’une augmentation de la tension artérielle qui évolue de façon péjorative. Le traitement de l’insuffisance rénale (insuffisance de filtration des reins) est nécessaire. L’évolution est rapidement progressive et devient irréversible et fatale en quelques mois. Néanmoins, avec l’arrivée des nouveaux traitement contre l’hypertension artérielle (voir traitement ci-après), les résultats sont devenus meilleurs et la survie a dépassé 2 ans.

6 – Au niveau des appareils respiratoire et cardiaque, l’atteinte des poumons est à l’origine d’un essoufflement à l’effort associé à une inflammation des plèvres (membranes de recouvrement et de protection des poumons). On observe quelquefois une péricardite (inflammation de la membrane de recouvrement du cœur, le péricarde) s’associant avec des troubles du rythme et des troubles de la conduction de l’influx nerveux à l’intérieur du cœur permettant les contractions des ventricules et des oreillettes. Ceci se traduit par des extrasystoles ventriculaires (contractions supplémentaires des ventricules cardiaques). La conséquence de ces anomalies cardio-vasculaires est une insuffisance de fonctionnement de la pompe cardiaque (insuffisance cardiaque) s’associant à une augmentation de pression à l’intérieur des vaisseaux des poumons. L’évolution se fait quelquefois vers un durcissement du myocarde lui-même (sclérose myocardique) alors que l’atteinte pulmonaire est variable suivant les individus. La digitaline (médicament permettant le renforcement des contractions cardiaques) est peu efficace.

Physiopathologie

La dermatosclérose s’accompagne de problèmes vasculaires au niveau de la peau, mais également d’une atteinte des articulations, des viscères et plus spécifiquement de l’oesophage, des poumons, des intestins, du coeur et des reins.

L’altération et le durcissement du tissu conjonctif (tissu de remplissage et de soutien de la plupart des organes du corps), sont dus à une détérioration et à une augmentation, de la taille des fibres de collagène (une des protéines composant le tissu conjonctif).

Épidémiologie

La dermatosclérose est une maladie dont la cause est inconnue, qui touche environ 2 à 16 individu par millions d’adultes. Elle est plus fréquente chez la femme et débute le plus souvent entre 40 et 50 ans.

Examen médical

Labo

Détermination du type HLA (sorte de carte d’identité immunitaire de l’individu) et plus spécifiquement HLA-DR5 ou HLA-DR1
Anticorps de centromère, plus particulièrement fréquent chez les personnes atteintes du syndrome CREST.
Le FR est présent chez 1/3 des malades atteints de dermatosclérose.
Anticorps antinucléaires et anti nucléolaires présents dans environ 90 % des cas.

Examen complémentaire

La capillaroscopie, technique qui visualise les vaisseaux et les capillaires (petites artères microscopiques) de la peau, permet de mettre en évidence de petits vaisseaux dilatés associés à une perte de vascularisation de certains vaisseaux qui, normalement, devraient être présents à ce niveau-là.

La biopsie cutanée au niveau de la zone de peau indurée montre un épaississement du collagène. Le derme apparaît aminci et l’on remarque une disparition des papilles dermiques. La zone papillaire se situe en superficie (mince couche permettant le passage de nombreux vaisseaux sanguins et de fibres nerveuses, contenant également les papilles du derme). La biopsie peut également montrer une accumulation de lymphocytes T. (variété de globules blancs) dans le derme et le tissu sous-cutané.

Traitement

Traitement

Il n’existe pas réellement de traitement susceptible de modifier l’évolution de la maladie.
Certains symptômes peuvent néanmoins être traités par les corticoïdes (cortisone), en particulier chez les patients atteints de myosite, d’une inflammation de la synovie ou d’une connectivite (maladie auto-immune) mixte invalidante.
Médicaments comprenant l’enzyme de conversion de l’angiotensine quand il existe une atteinte rénale.
Quelquefois, l’administration de pénicillamine réduit épaississement de la peau et retarde l’apparition de pathologies viscérales. L’utilisation d’antibiotiques comme les tétracyclines est susceptible d’avoir de répercussions sur la flore intestinale (microbes présent dans les intestins) et d’améliorer les symptomes de malabsorption intestinale.
Quand il existe une atteinte de l’œsophage, il est parfois utile d’avoir recours au fractionnement des repas, aux antiacides et à la cimétidine (entre autres). Celle-ci s’emploie une demi-heure avant le repas et au coucher. La surélévation de la tête apporte quelquefois de bons résultats. Enfin, en cas de sténose de l’œsophage (fermeture de son calibre), il est parfois nécessaire d’avoir recours à une dilatation périodique (technique visant à réouvrir le diamètre de l’œsophage).
La nifédipine est quelquefois employée dans le syndrome de Raynaud.
La kinésithérapie préserve quelquefois la diminution de la force musculaire. Néanmoins, elle apparaît décevante en ce qui concerne la raideur articulaire.

Enfin, en présence d’une insuffisance rénale terminale, la dialyse et parfois même la transplantation rénale sont envisagées.

Évolution

Évolution

Elle est variable suivant les individus mais, de façon générale, elle est lente.
Les viscères sont globalement touchés chez l’ensemble des malades, mais ce sont les malades avec une atteinte cardiaque et pulmonaire qui présentent le pronostic le plus sombre.
Néanmoins, chez certains, la maladie est quelquefois stabilisée pendant de longues années, comme ceux présentant un syndrome CREST.

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