Poisson et santé ne font pas si bon ménage

© Poisson et santé ne font pas si bon ménage

Manger du poisson, est-ce bon pour la santé ?

Oui mais ... avec modération : l'agence nationale de sécurité alimentaire (ANSES) a publié en 2015 un avis recommandant de ne pas dépasser 2 portions de poisson par semaine, et les choses ne se sont malheureusement pas arrangées depuis ...

 

 

Depuis des années, le message était clair: il faut manger du poisson !

Manger du poisson nous apporte protéines, omégas 3, minéraux, vitamines, …
Et il est vrai que le poisson a des qualités nutritionnelles précieuses, C'est une excellente source de protéines et sa forte teneur en omégas 3, notamment ceux dits "à longue chaîne" (DHA et EPA) en fait une bonne source de prévention contre les maladies cardio-vasculaires.

… mais aussi substances chimiques (PCB, dioxine, méthylmercure, furanes) et micro-organismes pathogènes (bactéries, parasites)  !
Mais les poissons vivent dans l'eau ! Et qu'elle soit douce ou salée, l'eau dans laquelle ils vivent est polluée. On  retrouve donc dans leur chair des bactéries, des virus, et des quantités grandissantes de polluants (notamment dioxine, mercure et PCB). Ces substances chimiques sont particulièrement dangereuses pour les femmes enceintes et les jeunes enfants.

C'est bien évidemment l'augmentation incessante de la pollution des eaux de mer et de rivière qui est responsable de cette contamination des poissons et donc de leur possible dangerosité pour la santé humaine.
Même la déforestation augmente la pollution des eaux en entraînant vers la mer de grandes quantités de mercure (il y a en 2 fois plus dans les 100 premiers mètres de profondeur des océans qu'il y a 100 ans).

 

MERCURE ET MÉTHYLMERCURE
​Le mercure est un métal naturellement présent dans l'environnement. Mais les activités humaines (métallurgie, exploitations minières, combustion des déchets, transformation de pâte à papier, combustion fossile, …) augmentent considérablement sa présence. Après des réactions chimiques, il se tranforme, notamment en méthylmercure, et devient dès lors toxique et absorbable par l'organisme (bioaccumulable). Bien que son taux de concentration dans l'eau soit assez faible, il augmente dans la chair des poissons du fait qu'ils se mangent les uns les autres : les gros poissons (les gros prédateurs) sont donc plus toxiques que les petits (les proies). C'est en consommant les poissons crus que l'on s'expose le plus à une intoxication au mercure.

Le méthylmercure est toxique à haute dose pour le système nerveux central humain, plus particulièrement pendant la gestation et au cours de la petite enfance (risques de retard de développement et de troubles du comportement).

Les poissons les plus susceptibles d'être contaminés au méthylmercure sont :

  • anguille et civelle
  • ​aspe
  • ​barbeau
  • baudroie ou lotte
  • brèmes
  • bonite
  • brochet
  • capelan de Méditerranée
  • cardine
  • ​chevesne
  • dorade
  • empereur
  • escolier noir ou stromaté
  • escolier serpent
  • espadon
  • esturgeon
  • flétan de l'Atlantique
  • grande sébaste
  • grenadier
  • hoplostète orange ou hoplostète de Méditerranée
  • lamproie
  • loup de l'Atlantique
  • marlin (proche de l'espadon)
  • mulet
  • pageot
  • pailona commun
  • palomète
  • ​perche
  • raie
  • requin
  • rouvet
  • sabre argent et sabre noir
  • sandre
  • siki (variété de requin)
  • silure
  • tanche
  • thon
  • voilier de l'Atlantique

 

PCB (POLYCHLOROBINÉPHYLES) OU PYRALÈNES
Il s'agit de composés aromatiques chlorés utilisés par l'industrie (encres, peintures, transformateurs électriques, …). Interdits en France depuis 1987, ils persistent dans la nature (notamment dans les sédiments marins et de rivière) car ils sont peu biodégradables. Ils se concentrent dans les tissus graisseux des animaux (on en trouve même dans le beurre !).

La dangerosité des PCB pour l'être humain provient de son accumulation dans l'organisme au cours du temps, donc d'une intoxication chronique (alors qu'un exposition ponctuelle n'a que peu d'impact sur la santé, sauf en cas de forte dose, qui provoque des troubles cutanés, oculaires et hépatiques).
Les effets des PCB sur la santé sont essentiellement neuro-comportementaux chez l'enfant exposé au cours de la gestation ou au cours de l'allaitement.
Chez l'adulte, on note des effets sur la thyroïde et des perturbations du métabolisme.

 

DIOXINES
Il s'agit de molécules chimiques qui peuvent être produites par des phénomènes naturels (volcans, incendies de forêt) mais dont la présence dans l'environnement est essentiellement due aux activités humaines (incinérateurs ménagers, industries métallurgique et sidérurgique, industrie du papier, fabrication de pesticides, …). On les retrouve essentiellement dans le sol, et dans certains aliments (produits laitiers, viandes, poissons et crustacés).

Leurs effets sur l'organisme humain sont extrêmement graves : dégradation du système immunitaire, du système endocrinien, du système nerveux, troubles de la reproduction, cancers (le Centre International de Recherche sur le Cancer les a classées dans la catégorie "cancérogènes pour l'Homme"). L'exposition accidentelle à une forte dose est très dangereuse.

 

QU'EN EST-IL DES POISSONS D'ÉLEVAGE ?
Les poissons et crustacés d'élevage devraient être épargnés par ces pollutions, mais il n'en est rien. Outre les farines animales, les antibiotiques et les pesticides, les saumons d'élevage sont aussi imprégnés de dioxines et de PCB.
Ainsi, une pharmacologue de l'organisme norvégien de sécurité (le Nifes) a sonné l'alerte en déclarant que "la présence de polluants tels que les dioxines et le PCB dans le saumon génère un risque de cancer, qui, pour les personnes jeunes, dépasse les bénéfices attendus du saumon sur la santé (…) Les polluants retrouvés dans le saumon d’élevage ont une mauvaise influence sur le développement du cerveau, et sont associé à l’autisme, à l’hyperactivité et à la baisse de QI. On sait aussi qu’ils peuvent avoir un effet négatif sur les défenses immunitaires, le système hormonal et le métabolisme. Ils se transmettent aussi par allaitement."

 

ET LES COQUILLAGES ET FRUITS DE MER ?
Ils subissent le même sort que les poissons : vivant dans des eaux polluées, ils sont exposés aux même polluants. Les coquillages sont particulièrement concernés : en filtrant l'eau, ils concentrent de grandes quantités de toxiques (bactéries, parasites, virus) dangereux pour la santé humaine. D'où l'intérêt de choisir ceux provenant d'un élevage contrôlé.

 

ALORS, PEUT-ON CONTINUER À MANGER DU POISSON ?
L'objectif des travaux de l'ANSES a été de trouver le juste équilibre afin de pouvoir bénéficier des qualités nutritionnelles des produits de la pêche sans s'exposer à des risques pour la santé. L'agence recommande donc de consommer 2 fois par semaine du poisson, dont un poisson gras (sardine, maquereau, saumon, truite fumée, hareng). 2 fois par semaine et pas plus !

Par ailleurs, certaines catégories de la population font l'objet de recommandations spécifiques : ainsi, les femmes enceintes ou allaitantes et les jeunes enfants doivent limiter leur consommation de poissons, coquillages et fruits de mer (voir détails plus bas).

 

LES RECOMMANDATIONS DE L'ANSES

Pour l'ensemble de la population :

  • consommer du poisson 2 fois par semaine, dont 1 poisson gras (saumon, maquereau, sardine, anchois, hareng, truite fumée, …)
     
  • diversifier les espèces de poissons consommées
     

Pour les femmes enceintes et allaitantes,  et les enfants de moins de 3 ans :

  • éviter les poissons les plus contaminés (les plus gros : espadon, requin, lamproies, …)
     
  • limiter la consommation de poissons susceptibles d'être fortement contaminés à 150g par semaine pour les femmes enceintes et allaitantes, et à 60g par semaine pour les enfants de moins de 3 ans.
     

EN CONCLUSION
Plus que jamais, la vigilance est un élément primordial de la prévention en matière de santé. Ce qui était bénéfique il y a encore quelques années est parfois devenu dangereux. Se tenir informé devient essentiel pour se protéger.

 

Sources :
http://www.anses.fr/fr/content/consommation-de-poisson-deau-douce-et-impr%C3%A9gnation-aux-pcb-une-%C3%A9tude-nationale

http://www.iarc.fr/fr/publications/pdfs-online/breport/breport0809/breport0809_IMO_fr.pdf

http://www.anses.fr/sites/default/files/documents/RCCP2010sa0203.pdf